Chers amapiens,
Voici quelques nouvelles de la ferme. Rien de très neuf sous le soleil, nous ne voulons pas nous montrer trop pessimistes et ne voulons pas non plus coller au cliché de l’agriculteur plaintif mais force est de constater que l’année agricole mal commencée ne connait pas de rattrapage évident.
Nous parons au plus pressé, tentons de faire ce qu’il y a à faire mais notre travail ne nous apporte guère de satisfaction cette année…
A cette époque de l’année, d’habitude, le jardin est rempli de cultures, nous peinons à trouver les quelques planches nécessaires à la mise en place des dernière cultures de la saison à savoir, les derniers haricots, les navets et les radis d’hiver…cette année les espaces vides ne manquent pas…
Concernant l’été :
C’est mitigé, les tomates commencent à bien produire sous serre mais nous ne sommes pas à l’ abri de fluctuations car les plants montent très haut et beaucoup de fleurs ont coulé du fait des fortes chaleurs.
Les aubergines restent prometteuses mais comme je vous en avais déjà parlé, les acariens menacent et si nous parvenons à les maintenir à des niveaux acceptables il n’en faut pas beaucoup pour qu’ils s’installent et mettent en péril la production.
Globalement, les fortes chaleurs sont assez préjudiciables aux cultures sous serre. D’habitude quand la production sous serre décline, le plein champ vient prendre le relais. Là ça va être juste car en raison du mauvais printemps, nous avons mis moins de cultures dehors et du coup le relais sera moins efficace.
Notre stratégie à l’époque avait consisté à remplir les serres avec les plants initialement destinés à l’extérieur. Cette stratégie n’a que partiellement fonctionné car les variétés prévues pour l’extérieur ne sont pas les mêmes que pour les serres; on a tenté, car il fallait faire un choix, mais les courgettes de variétés anciennes mises sous abri ne donnent vraiment rien. Dehors ça va mais nous savons que la production ne pourra pas se maintenir jusqu’à la fin de l’été.
Nous avons aussi mis beaucoup de haricots sous serre, ça a failli bien fonctionner mais finalement non, les plantes sont immenses mais les fortes chaleurs contrarient la fécondation des fleurs et les gousses sont vides, ça ne vaut pas la peine de récolter. Sous serre, nous avons de très belles plantes qui produisent très peu… nous allons semer d’autres haricots dehors et devons en récolter demain mais vraiment ce n’est pas génial.
Pour l’arrière saison et l’hiver :
Nous désherbons des carottes tous les jours, elles ont relativement bien levé, nous attendons de finir le désherbage pour les couvrir d’un voile anti-insecte et si tout se passe bien les carottes seront au rendez vous cet automne.
Les poireaux : nous les cultivons chez notre collègue et ami à Revel, la plantation a relativement bien repris, nous l’avons binée mécaniquement 2 fois et Patrice a traité hier contre la teigne, avec de l’eau et du soleil ça devrait pousser.
Les choux : nous en avions semé plus de 1000 ( 200 de chaque variété…) la reprise a été très très difficile, il a fait très chaud juste après la plantation et malgré des arrosages fréquents beaucoup ont grillé avant de reprendre. Nous allons compenser avec du chou chinois qui se sème plus tard mais avons renoncé à acheter du plant car nous jugeons plus prudent de ne pas multiplier les dépenses en vain…
Nos betteraves végètent, des salades arrivent bientôt mais petites..
Nous devons récolter nos mini échalotes et penser à récolter les oignons .
Nous avions mis en culture une centaine de melons mais les dernières pluies orageuses ont fait éclater ceux qui allaient donner sous peu et le rendement est très médiocre.
Les courges : nous avons 3 plantations en place l’une d’elles est vraiment vilaine, les autres ça va à peu près, à suivre donc…
Les poules :
Ca empire. La ponte diminuait sans signe de reprise, devant cette nouvelle dégradation, je suis repassée chez le vétérinaire pour acheter un vermifuge chimique ne voyant plus quoi tenter d’autre. C’est la raison pour laquelle il n’y a pas eu d’œufs la semaine dernière, pas plus qu’il n’ y en aura mercredi. Le traitement impose de jeter les œufs 8 jours (Cédric le mari de Claire nous avait parlé d’un vermifuge qui ne nécessitait pas de jeter les œufs mais à Revel ils ne connaissaient pas et je ne voulais pas attendre plus pour tenter une énième fois quelque chose pour les poules), en bio il est préconisé de multiplier le délais d’attente par 2, pour consommer les œufs, donc les prochains œufs comestibles ne seront ramassés qu’ à partir de mercredi 21 Aout…
D’ici 10 jours (quand les traces du vermifuges seront dissipées), je dois porter quelques poules chez le vétérinaire pour les euthanasier et les envoyer au labo de la DSV à Toulouse; avant de reprendre d’autres poules il faut que nous ayons pu écarter les risques de certaines maladies qui parasitent les terrains très longtemps ou qui se transmettent aux poussins que nous pourrions obtenir en mettant des œufs à couver. Parallèlement, nous recherchons un fournisseur de complément alimentaire pour les poules ( des protéines et des acides aminés ) afin d’avoir une ration plus performante. Tout cela en vue d’éliminer le plus possible les déboires futurs; ces démarches sont longues car les fournisseurs existant ne livrent qu’ à partir d’une tonne de commande et vu la durée de conservation des ces aliments, c’est un volume que nous ne pouvons atteindre, nous essayons donc de nous grouper avec des collègues mais ne sommes donc pas maitres des délais …
Concrètement nous ne savons pas exactement quoi faire avec ce contrat « œufs » : je ne pense pas que l’état de nos poules soit vraiment améliorable à court terme et je pense qu’il va falloir les sacrifier. Nous les avons goutées, elles sont toutes petites (1 kg) mais très bonnes a manger que ce soit en sauce ou rôties (elles restent fermes mais pas dures et le gout est très bon)
Nous ne savons pas quoi vous proposer : annuler le contrat œufs : dans un sens ça nous soulagerait mais ça compliquerait beaucoup la gestion car il faudrait rendre de l’argent à chacun d’entre vous, ça fait beaucoup de calcul et de chèques .
Transformer le contrat œufs en contrat œufs/poulet : on fait abattre les poules et on vous livre 2 poulets par contrat et ça permet de le maintenir en attendant que nous retrouvions d’autres poules. Ça serait en cohérence avec l’engagement Amap après ce n’est pas simple à gérer car il nous faut passer par l’abattoir et trouver un système réfrigéré pour le transport. Et puis, entre celles qui sont déjà mortes et avec celles que nous avons déjà mangées et celles que nous espérons garder pour la reproduction ça ne ferait peut être pas tout à fait deux poules par contrat.
Dans tous les cas cela ne pourrait se faire que vers début septembre car il nous faut le temps de faire les analyses et de recevoir les résultats (pour savoir si nous pouvons garder ou non des reproducteurs)
Pour cet automne, il nous sera impossible de retrouver si vite des poules non hybrides et serons obligés de nous fournir où nous pourrons en poulettes bio prêtes à pondre. Ces dernières seraient nées en Avril/mai et entreraient en ponte à l’automne ce qui nous permettrait d’avoir des œufs pendant l’hiver théoriquement.
Par le biais de Jean Nicolas j’ ai eu la chance de rencontrer un voisin, retraité, passionné de volailles de races et grâce à lui, nous allons sans doute parvenir à constituer un petit cheptel de poules anciennes car il est équipé de couveuses et d’éleveuses qu’il propose de prêter et du coup nous pourrons trouver à acheter : ou des œufs fécondés, ou des poussins de 1 jour des races qui nous intéressent et de les avoir tous petits à la ferme ce qui leur donnera une bien meilleure rusticité que lorsqu’elles proviennent d’élevages plus artificialisés que le notre. Mais tout cela demande du temps car il nous faut aménager un lieu adéquat et ça va nous demander des investissements. En effet, l’ennemi numéro 1 du poussin c’est le rat et ceux là sont abondants à la ferme, il nous faut donc couler une dalle sous un hangar pour pouvoir installer une poussinière…donc pour le moment, nous ne voyons pas d’autres solutions que de nous tourner vers les poules disponibles sur le marché.
Le projet pain :
Comme nous l’avions évoqué avec certains d’entre vous, on a eu un gros souci sur notre blé cette année : la carie, une maladie redoutable qui touche surtout les blés anciens non traités et qui a failli nous faire perdre la totalité de la récolte. Finalement, nous avons moissonné car une des deux variétés cultivée n’était pas touchée; nous pourrons donc faire notre pain avec notre farine la Bladette de Puylaurens, mais aussi avec notre Touzelle (l’autre variété car il est possible de trier le blé abimé et de rincer le grain sain qui aurait été en contact avec les spores de champignon (non toxique) présents sur le grain malade. Les rendements ont cependant été très faibles et il nous faudra peut être acheter un peu de grain pour compléter.
Les travaux du four à pain avancent lentement mais sûrement. Nous espérons réaliser les premières fournées vers le mois d’octobre.
Le non travail du sol :
Cette saison de maraichage nous donne tant de fil à retordre que nous perdons un peu la foi…non sur la pertinence de ces techniques qui ont fait leur preuve en grandes cultures et qui fonctionnent çà et là chez quelques collègues ou jardiniers…mais nous doutons de notre capacité a pouvoir supporter tant d’incertitudes quant à la durée de la transition ; période avant laquelle les tâtonnements et l’adaptation de ces techniques risquent de poser des problèmes avant que les effets n’apparaissent au plan économique. Sans entrer dans les détails : notre terre, sa structure, la vie qu’elle contient s’améliore nous en sommes persuadés, mais pour le moment les résultats techniques sont décevants : les dégâts collatéraux (envahissement par les vivaces liserons, chardons), difficultés d’implantation des cultures faute d’outils adaptés l’emportent pour le moment sur les bénéfices d’un sol couvert et non travaillé…nous savons que cette étape est transitoire et qu’il faut observer, comprendre et adapter mais cette année avec le mauvais début de saison ça fait trop et on arrive pas à encaisser. On a peut être été trop ambitieux : une année normale on s’en serait sans doute sortis mais cette année ça fait trop…alors on n’ abandonne pas mais on fait une pause et on a ressorti nos outils classiques depuis le semis des carottes histoire de pas se rajouter trop de difficultés.
Avant-hier j’étais au centre de gestion où nous avons été un peu rassurés sur l’état économique de la ferme…nous n’avons perdu « que » 5000 euros jusqu’à maintenant …on pensait que c’était pire et sommes un peu soulagés. Cela étant, travailler chaque jour de l’année pour ne pas remplir vraiment les paniers comme nous aimons le faire tout en perdant de l’argent quotidiennement, c’est démoralisant…on aimerait comme des marmottes entrer en hibernation et se réveiller au printemps prochain avec une nouvelle énergie et de nouveaux espoirs.
Avant de finir, car je ne veux pas plus longtemps abuser de votre attention : nous sommes très conscients que cette année est charnière pour nous, si nous ne nous en sortons pas mieux rapidement nous ne pourrons plus nous réaliser dans notre travail et accepter les contraintes qui lui sont inhérentes; nous envisageons donc un changement vraiment important pour l’année prochaine, je vous en touche deux mots maintenant mais nous aurons l’occasion d’en reparler lors de l’AG ou avant si ça vous dit.
En gros nous pensons vraiment réduire beaucoup le maraichage car : c’ est trop dur, ce doit être la plus ingrate des activités agricoles bien qu’elle soit notre préférée…en outre, nos conditions : manque d’eau, terre lourde, ne nous permettent pas de développer en envisageant une mécanisation plus poussée qui nous ferait gagner en productivité. Dans ces conditions, proposer des paniers à 28 euros diversifiés comme il se devrait ça nous est trop difficile. Nous envisageons de vous proposer un panier plus simple, composé d’en moyenne 4/5 légumes de saison et moins couteux, exemple : au printemps on ne ferait que oignons, salades, pdt précoce, fève; en été : tomate, haricot, salade + concombre, courgette mais on ne ferait pas forcément 3 plantations de chaque comme on fait actuellement pour en avoir de la fin du printemps à l’automne ; en hiver ce serait plus réduit aussi carottes, poireaux, verdure …le choix des légumes n’est pas arrêté, nous cultiverions ce que nous savons faire le mieux et le panier de légumes aurait pour vocation de vous fournir une base de légumes conséquente mais que vous compléteriez selon vos gouts à côté .
Cela nous permettrait de diminuer la surface cultivée et de mieux planifier nos cultures : en fait nous privilégierions les cultures en sec (ail, oignon, échalote) les cultures dont le désherbage est mécanisable (ail, oignon, échalote + poireaux, haricot, fèves, pdt nouvelles) et celles qui sont incontournables ( carotte, tomates, courges…)
A coté des légumes nous vous proposerions d’autres possibilités de contrat : œufs (après cette année difficile au moins nous aurons appris des choses et comme cet élevage marche en général bien pour les autres il n’ y a pas de raison que nous n’y parvenions pas…), poulet, pain.
Voila pour les dernières nouvelles …je pense qu’il faudra refaire un point vers Septembre, relatif au panier légumes, on ne veut emprisonner personne dans ce contrat …réellement l’ Amap est un véritable rempart contre l’adversité cette année et la comptable s’en est bien aperçue en voyant ces gros dépôts réguliers sur le compte de la ferme; vous nous permettez réellement de limiter les dégâts et c’est énorme. On peut espérer que l’année s’arrange et que l’automne ne soit pas vraiment mauvais mais c’est vrai que nous avons un peu perdu confiance et là avec l’été, la chaleur nous arrivons moins que les autres années à multiplier les efforts. La nounou des enfants est en vacances, les travaux du four à pain demandent du temps, il nous arrive de faire des journées moins longues que les étés précédents …Patrice a arrêté de fumer : c’est très positif pour nos finances mais les insomnies qui accompagnent ce grand changement lui rendent le travail plus pénible qu’à l’accoutumée…
Sachez seulement que nous sommes plus que jamais conscients et reconnaissants de la confiance que vous nous accordez et que nous allons faire notre possible pour honorer les contrats au mieux …si malgré tout ça nos efforts ne portaient pas leurs fruit nous saurons nous souvenir et compenser dès que les conditions seront meilleures…
Merci pour tout.
Vos producteurs, Marion et Patrice